lundi 28 janvier 2013

Les petites criques au nord de la base

Au nord de la base Alfred Faure, les falaises qui terminent le Plateau Jeannel s'abaissent jusqu'au niveau de la mer pour former  deux petites criques (Sphinx et Chaloupe) bien protégées des assauts des vagues et des vents dominants.. C'est une zone elle-même "protégée" sur le plan réglementaire: son accès y est restreint aux activités scientifiques, dans la pratique ce sont surtout les ornithologues et l' "Ecobio" de la mission qui ont l'occasion de s'y rendre. 

Un extrait de la carte IGN de 1977 qui reste notre meilleure référence...
Après 40 minutes de marche d'approche, on aborde la crique du Sphinx, ainsi surnommée en raison d'un rocher caractéristique. Un ruisseau se jette dans la mer et quelques dizaines de manchots royaux s'y abritent. 


La petite plage de galets est couverte d'algues orangées...

Les laminaires, sorte d'algues géantes, envahissent une partie de la crique. 

Une jeune otarie prend le soleil sur un rocher pendant que sa mère pêche dans la petite crique....pas de prédateur  pour cet individu d'une vingtaine de kilos: les familles d'orques semblent avoir déserté le secteur depuis quelques semaines déjà.
 On quitte la crique du Sphinx pour se diriger au Nord le long du rivage bordé de falaises.


 En ce milieu d'été austral, les grands albatros couvent leur oeuf  unique. Le mâle et la femelle se relaient sur le nid. Les ornithologues en profitent pour contrôler les bagues des couveurs: chaque nid de l'île est répertorié par un numéro et un point GPS, chaque individu est bagué quand il n'est encore qu'un gros poussin incapable de voler.

"Le Pouce", formation de brèche basaltique qui émerge du sol tourbeux.

La crique de la Chaloupe ressemble à un modeste fjord...

Elle se termine par une petite plage occupée par une manchotière. Quelques centaines de manchots royaux y couvent leur oeuf. Des éléphants de mer s'y prélassent aussi à l'abri du vent.

Vue de la Crique depuis l'intérieur des terres.


vendredi 25 janvier 2013

A "La Pérouse" avec la Réserve Naturelle

Des trois refuges de l'île de la Possession, celui de La Pérouse est de loin le moins fréquenté. Il est situé à environ quatre heures de marche au sud de la base Alfred Faure. Deux agents de la Réserve Naturelle Nationale s'y s'ont rendu mi-janvier pour y rechercher une vingtaine de sites caractéristiques, pour une étude à long terme de la végétation. 
La première partie du déplacement est un peu fastidieuse, elle traverse le Plateau des Pétrels, une vaste zone caillouteuse parfois chaotique où ni la faune ni la flore ne brillent par leur abondance. De plus ce plateau est fréquemment dans le nuage, limitant la visibilité à une centaine de mètres. L'arrivée à la Crête du Styx (altitude: environ 700 mètres) marque  un changement de paysage: les vues sont plus lointaines et on distingue le prochain point caractéristique, le "Lac Perdu".


Après une descente assez raide, on remonte le cours d'un ruisseau pour arriver à sa source: le Lac Perdu (altitude 477 mètres), seule étendue d'eau douce sur l'île de la Possession, en dehors de quelques mares côtières. Selon les biologistes, il n'y a quasiment aucune faune aquatique dans ce lac, en dehors d'hypothétiques vers plats, les planaires. Par contre les skuas viennent se retrouver sur ses berges.


Une fois passé le lac, on s'engage dans une longue descente vers l'océan, dans une vallée étroite. Rapidement on y retrouve le soleil qui donne des couleurs moins ternes que sur les sommets très couverts.


En descendant, les cris d'un couple de skuas, oiseaux habituellement peu farouches envers l'homme, attirent l'attention: ils essayent d'éloigner les intrus de leurs deux poussins...




En arrivant près du rivage, sur la gauche se dresse une curieuse formation volcanique, surnommée le "Téton de l'Amazone".


De l'autre côté, une falaise d'orgues basaltiques érodés descend jusque sur la plage de galets.


Une descente sur la plage permet de rencontrer (et contourner) ses gardiens: des otaries aux grandes canines redoutées des scientifiques.... infection garantie en cas de morsure! Ces animaux n'hésitent pas à charger et se déplacent assez vite sur leur ailerons, contrairement aux éléphants de mer plus patauds. 


En poursuivant un peu plus loin, on passe sous l'arche (moins spectaculaire que celui de Kerguelen, mais encore intact)


Derrière l'arche, niche une petite colonie de gorfous macaroni, eux aussi avec des poussins à protéger.



Il est temps de rentrer vers le refuge, de construction récente (2010) puisque qu'une tempête a dispersé "façon puzzle" la cabane précédente... ce refuge, prévu pour trois ou quatre personnes, est à environ un kilomètre plus haut dans la vallée. Il dispose de l'eau courante à vingt mètres devant la porte. Il est agréable de faire la vaisselle ou sa toilette dans de l'eau à 3°C !


Il est solidement arrimé à un radier, dans l'espoir de le retrouver intact à la prochaine sortie... Dans les touques bleues, on trouve les stocks de vivres et les bouteilles de gaz. La cabane semble rudimentaire, mais c'est un plaisir que de s'y abriter pour la soirée! 


Le lendemain, le travail commence: il s'agit pour les deux agents de la réserve Naturelle de trouver une vingtaine de zones présentant certaines caractéristiques de couverture végétale (les "habitats"), et de décrire avec précision ce qu'on trouve dans un carré de 20 mètres de côté. Dans quelques années, ce carré (repéré par GPS) sera de nouveau étudié et les évolutions éventuelles analysées. Ci-dessous, on mesure un carré à l'aide d'un décamètre à proximité du "Lac Coeur", petite mare de forme caractéristique. L'habitat considéré est ici un tapis continu d'azorelles avec quelques touffes d'agrostis, sur un sol tourbeux saturé d'eau. Notez que les conditions météo ont changé depuis la veille !


Les agents de la RN recensent alors toutes les espèces présentes, leur abondance, leur taille ainsi que les caractéristiques du terrain. Ils marchent avec des raquettes pour éviter de détériorer la couverture végétale et de s'enfoncer dans le sol jusqu'aux genoux...


Mathieu, qui passera un an à Crozet...


Et Sébastien, en campagne d'été pour quatre mois, prend des notes sur un habitat de "blechnum", une fougère rase qui pousse sur les pentes et sur laquelle il est agréable de s'asseoir après des heures à arpenter le terrain sous la pluie.


Mathieu et Sébastien, accompagnés du "Discro", ont regagné la Base au terme de quatre jours sur le terrain.
Prochains messages du blog sur le passage du palangrier "Cap Horn", sur les travaux à la base et sur les petites criques cachées...

dimanche 13 janvier 2013

Quoi de neuf à Crozet?

Le passage à la nouvelle année a été dignement fêté sur la base Alfred Faure. Après un copieux et excellent diner, le groupe local des "Pétrels Magiques" s'est produit pour la première fois sur scène avec un répertoire éclectique de neuf chansons, allant de "Diego, libre dans sa tête" à "Losing my religion"....

Guillaume, la blonde à la guitare; Philippe, le clown à la batterie; Fabrice comme chanteur.
Ce nouvel an a été comme de tradition le point de départ de bonnes résolutions, notamment capillaires. J'ai beaucoup hésité avant de poster ces photos, par respect pour les familles et pour préserver l'hypothétique avenir professionnel, social et affectif des intéressés. Mais je n'ai pas pu me résoudre à passer le résultat sous silence. Jugez plutôt:

Les lunettes noires pour nuits blanches chères à Thierry Ardisson
Des siamois collés par l'épaule, qui ont du être opérés avant d'être étouffés par l'emballage...on les a hydraté en attendant!
Celui-là, c'est le Schtroumf fêtard !
Quand on sait qu'il a servi sur un sous-marin nucléaire, on mesure vraiment à quoi on a échappé de justesse: Brest a failli finir comme Tchernobyl...
Bon, assez de ces photos pathétiques... Une fois remis des excès des fêtes, la vie a repris son cours. Mathieu, agent de la Réserve Naturelle, a réalisé une belle prise: une truite de 58 cm pêchée dans la rivière qui coule au pied de la base. Carpaccio en instance...
Précisons que la truite est une espèce introduite à Crozet et donc non protégée! D'ailleurs elle ne semble pas avoir de prédateurs autres que les hivernants.
Le dimanche 13 janvier, nous avons eu la visite du palangrier réunionnais "Mascareignes III", venu  faire soigner sur la base un de ses membres d'équipage. Sur la grosse trentaine d'hommes à bord, cinq sont descendus à terre pour la matinée, avant que le navire ne nous quitte vers midi pour reprendre sa pêche à la légine.

Trois membres de l'équipage et le contrôleur des pêches... le cinquième homme est entre les mains expertes de notre médecin!
Voilà, je ne résiste pas à l'envie de finir avec une photo d'un couple d'albatros fuligineux, perché dans une falaise non loin de la base.

Ces albatros ont une envergure d'environ deux mètres. Ces deux là sont probablement des "immatures", à cette époque les adultes couvent normalement leur oeuf au nid, par alternance.