vendredi 6 octobre 2017

J'vous ai apporté des bonbons ...

Et pendant ce temps les skuas se marrent ... 

Le roman photo de Crozet (âmes sensibles s'abstenir)


Les manchologues de la Baie du Marin ne savent plus où donner de la tête. En quelques jours ils ont vu arriver non seulement les adultes manchots dont certains commencent leur mue (scoop de dernière minute : on nous rapporte également quelques parades nuptiales), mais aussi les éléphants de mer. Les femelles de ces derniers ont commencé de mettre bas et notre carnet rose s’enrichit quotidiennement de nouvelles naissances de "bonbons", sobriquet affectueux que les îliens donnent aux jeunes éléphants de mer.

Mais qu'elles ont l'air appétissantes ces friandises poilues ! Le gigantisme des éléphants de mer n'ayant pour égal que la voracité des pétrels géants, nous avons assisté cette semaine à une scène bien cruelle qui nous rappelle la dureté de la nature. Un répit bien venu pour les poussins manchots de la Baie du Marin qui assistaient, cette fois-ci, goguenards à la curée. Car la le plus souvent ce sont eux qui font les frais de la faim insatiable des pétrels ! Et pendant ce temps les skuas se marrent car ils savent bien qu'ils se régaleront bientôt des restes du festin ... 


Mois de septembre en Baie du Marin

Tout au long du mois de septembre, et en ce tout début du printemps austral, les éléphants de mer ont réapparu en Baie du Marin (île de la Possession). La plage de Port Alfred est de plus en plus encombrée.

Les jeunes manchots qui, il y a encore quelques semaines, bénéficiaient de larges espaces tranquilles doivent désormais cohabiter avec d'éructants voisins. "Passe encore que les parents reviennent me casser les ailerons (ils m'apportent bien à manger), mais subir un tel voisinage est indigne de ma royale personne !" semble nous dire ce jeune "ado" scandalisé devant le sans-gêne d'un gros mâle éléphant, avachi dans sa manchotière.    

  

 Manchotière ou bonbonnière ?

La crèche de poussins manchots est en effet bientôt envahie par une autre nurserie. Les femelles éléphants de mer reconstituent les harems. Sous l'oeil toujours vigilant du pacha, elles donnent naissance à leur petit qu'elles n'allaiteront que quelques jours avant de convoler avec le gros mâle qui les surveille de près. Il est vrai que les belles sont très convoitées par une foule de prétendants qui n'ont toutefois guère de chance de faire le poids face au big boss et ses quelques trois tonnes.
   

Mais pour l'heure, ces dames n'ont cure des querelles des garçons. Elles se reposent de leur long séjour en mer, allaitent leur progéniture et semblent leur donner quelques leçons et conseils avant de très rapidement les laisser se débrouiller. Le temps étant compté, on passera vite sur le chapitre "bonnes manières" de l'éducation. Vous venez ainsi de comprendre pourquoi l'éléphant de mer est considéré comme un des animaux les plus malpolis du règne animal.

Note de la rédaction : Je crains que cette dernière remarque, quoique parfaitement argumentée, n'ait rien de scientifique. Pardon à nos lecteurs spécialistes des pinipèdes. Un droit de réponse leur est accordé sur ce blog. 





 Drame à Port Alfred : le gang des pétrels géants à encore frappé

En ce beau matin de début octobre tout semblait calme ... enfin calme, disons pas plus bruyant que d'habitude, les crèches de poussins royaux piaillaient alors que les adultes s'entrainaient à vocaliser pour les prochaines parades nuptiales, les éléphants de mer émettaient leurs continuels borgborithmes, les goélands et les skuas s'insultaient copieusement à distance ...

Soudain un cri déchirant couvrit le vacarme ambiant. L'atmosphère se fit soudain lourde, un profond silence enveloppa la Baie du Marin. Le cri d'une mère affolée ... Un simple moment d'égarement, un beau mâle élancé (note du correcteur : rayé = pas crédible) passant non loin, son regard avait quitté l'espace d'un instant son petit. Suffisamment de temps pourtant pour que le bonbon disparaisse ...  

NdlR : Bon, pour tout vous avouer, j'ai un peu exagéré la scène au profit du drame littéraire. En fait, malgré le cri effectivement déchirant de la mère, il n'y a pas eu le moindre moment de silence, ni le moindre intérêt quelconque du voisinage au drame qui se jouait alors à quelques mètres. Et pour être très honnête, la mère était d'autant moins attentive que le bonbon était chétif et ne semblait pas très en forme. La nature est si cruelle ... Pardon à nos lecteurs éthologues. Un droit de réponse leur est également accordé sur ce blog.



En quête de la moindre opportunité, les pétrels profitaient de l'inattention de la mère pour se jeter sur le bonbon ... Quelle aubaine ! Manchot matin midi et soir, ça finit par lasser. Alors du bonbon ! Le perfide volatile n'aurait jamais laissé s'échapper une telle occasion de festin.
 
Sa voracité n'ayant plus de limite le terrible volatile plonge sa tête dans les entrailles de sa victimes et l'en ressort sanguinolente. Le pétrel surexcité par cette profusion de nourriture en a les yeux exorbités. Il en déploie ses larges ailes d'aise (près de deux mètres d'envergure), à moins que ce soit pour éloigner les importuns et intrépides chionis.




Après de longues minutes d'indécente gloutonnerie, notre goinfre ailé, repu et le ventre rebondi, abandonne enfin ce qu'il reste du bonbon pour aller faire une sieste tranquille.

 



Les skuas s'esclaffent. Le pétrel a eu plus gros yeux que gros ventre. Ils vont aussi pouvoir faire bombance des restes. Ils ont bien fait de revenir profiter eux aussi de l'hospitalité légendaire de l'Île de la Possession. Le tuyau que leur avait donné leur vieille connaissance le léopard des mers n'était donc pas troué : on vient bien d'ouvrir un nouveau restaurant 3 étoiles en Baie du Marin (voir un précédent article du blog).

 

Les poussins de manchots observent la scène mi outrés, mi amusés. Pour une fois qu'ils ne sont pas au menu d'une de ces bamboches australes ! 

Ben quoi !








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