jeudi 26 mai 2022

FICHE ESPECE 4 : LE GORFOU SAUTEUR

 

Le Gorfou sauteur (Eudyptes filholi)

 

Critères d’identification –

Lui aussi membre des manchots à aigrettes, le Gorfou sauteur possède, comme son cousin le macaroni, des sortes de longs sourcils qui se poursuivent chez lui en touffes d’aigrettes. Bien moins clinquant que son cousin, les aigrettes du Gorfou sauteur sont beaucoup plus fines et moins fournies, légèrement plus longues, de couleur bien moins vives, d’un jaune blanchâtre passé, et ne se rejoignent pas en un mono-sourcil.

La taille est aussi un critère distinctif, car avec ses 50 à 60 cm de hauteur, le Gorfou sauteur est le plus petit des manchots présents à Crozet. Pour des critères plus approfondis, le bec du sauteur est aussi plus fin que celui du macaroni, même si ce critère à observer au loin est assez subtil il est vrai.

Cycle de vie –

Le cycle de vie du Gorfou sauteur est relativement similaire à celui du Gorfou macaroni. Le sauteur retourne à terre en colonie pour se reproduire tous les ans, vers le mois de novembre pour les gorfous de Crozet. Après la ponte aux alentours du mois de décembre, les parents se relaient pour la couvaison environ tous les 10 jours pendant un peu plus d’un mois, ce qui amène l’éclosion au courant du mois de janvier.

Comme chez le macaroni, la femelle dépose deux œufs dont le premier, plus petit, est quasi-systématiquement condamné à échouer. Seul le poussin issu du gros œuf survit en général, même si le premier œuf éclot.

Une fois le poussin sorti de l’œuf, il restera couvé par les parents, toujours à tour de rôle, pendant un peu moins d’un mois. Après ce laps de temps, les poussins de la colonie, devenus thermiquement indépendants des parents, se regroupent en plusieurs petites crèches au cours du mois de février. C’est entre mars et avril, âgés d’environ 70 jours, que les jeunes gorfous sauteurs quittent la crèche pour partir en mer après avoir abandonné le confortable duvet de poussin au profit du plumage d’adulte, indispensable pour affronter les eaux glacées de l’océan Austral.

Colonie – 

Souvent en cohabitation avec des Gorfous macaronis, il niche sur des rives rocheuses voire des falaises, des endroits souvent impossible d’accès pour toute autre espèce non volante, même pour le Gorfou macaroni qui n’ose pas escalader des pentes aussi escarpées, ce trouillard. Au sein de colonies pouvant accueillir seulement moins d’une centaine de couples jusqu’à plusieurs milliers, les nids sont une simple dépression grattée dans le sol, tapissée d’herbes sèches, de pierres et d’os. Comme son cousin avec lequel il partage, vous l’avez lu, beaucoup de points communs, les nids sont espacés d’une distance raisonnable, optimisant sûrement l’espace en évitant des conflits permanents entre couples proches. Bien que parfois à l’intérieur des terres, les colonies sont la plupart du temps à proximité de la côte, au plus près de la mer d’où le Gorfou sauteur émerge une fois de retour de ses voyages en mer pour se nourrir.

Comportement –

À l’inverse des autres espèces de manchots comme le royal ou l’empereur qui glissent sur le ventre pour se déplacer, le fameux tobogganing, lui pratique le parkour à l’extrême en sautant de rochers en rochers pour accéder aux parois les plus raides et les plus hautes. Trait au final propre à tous les manchots, le Gorfou sauteur est aussi évidemment un excellent nageur/plongeur, bien que lui n’ait pas besoin de battre des records pour être apprécié de tous. Particulièrement variable selon les individus, la profondeur moyenne de plongée maximale est estimée à environ 70 mètres, pour une durée maximale inférieure à 10 minutes (mais la profondeur moyenne d’une plongée est estimée à environ 30 mètres pour une durée moyenne d’un peu plus d’une minute).

Alimentation –

Actif majoritairement la journée, il se nourrit principalement de poissons, krill, calmars et crustacés. Bien que pouvant parcourir plusieurs centaines de kilomètres à d’autres endroits, le Gorfou sauteur semble aller se nourrir, pour ce qui concerne les districts des TAAFs, dans un rayon de 10 km autour de ses colonies, capturant ses proies près des côtes, lors de courts voyages d’une durée de quelques heures à quelques jours .

 

Gauche : Gorfou Sauteur ; Droite : Gorfou Macaroni (aquarelle Alexandre Vong, ornitho 109)


Rédacteur Alexandre Vong, ornithologue programme 109, guide de l'île de la Possession, aquarelliste, musicien, hivernant spiderman / Ipev



FICHE ESPECE 3 : LE GORFOU MACARONI

 

Le Gorfou macaroni (Eudyptes chrysolophus)


Critères d’identification –

Le Gorfou macaroni, ou gorfou doré (eh ouais, bling bling le petit) possède des aigrettes imposantes, comme de jolis plumeaux dorés se rejoignant en un mono-sourcil au-dessus de l’œil. Ces aigrettes sont vachement plus stylées que celles du gorfou sauteur qui sont plus délavées (oui c’est très objectif). Il est plus grand que son cousin, avec une taille moyenne de 71cm et pèse 5,5 kg en moyenne. Il présente un solide bec brun-rouge, des petites pattes rosées et possède également une petite marque blanche au-dessus du croupion. Comme pour presque toutes les espèces de manchots, il est quasiment impossible de faire la différence entre mâle et femelle.

Cycle de vie –

En période de reproduction, les mâles arrivent une semaine avant les femelles, et marquent leur territoire (cris, apport de pierres, expulsion des intrus). Les partenaires peuvent se retrouver d’une année sur l’autre, bien que l’attachement soit probablement autant au site qu’au partenaire. Les parents alternent des périodes de couvaison tous les 7-12 jours. Particularité des gorfous assez mal comprise, la femelle pond deux œufs, le premier plus petit que le second. La perte du premier œuf est quasiment systématique (99%). Le mâle s’occupe de petit poussin les 3 premières semaines suivant l’éclosion, pendant que la femelle va chercher de la nourriture en mer. Le petit poussin en quête de liberté rejoint ensuite une crèche et se fait des copains. Les parents continuent de le nourrir tous les 1 à 2 jours, jusqu’à l’âge de 2 mois environ, où les jeunes prennent alors leur envol (ben non, si t’as bien lu ça vole pas un manchot).

Colonie –

Les macaronis vivent dans des colonies, généralement situées sur des pentes rocheuses souvent escarpées. Elles peuvent être très grandes et abriter plusieurs milliers de gorfous. Ils vivent bien souvent en cohabitation avec des gorfous sauteurs. Le nid est une dépression aménagée par des cailloux, et camouflée par des rochers et des touradons. Les nids sont espacés de 30 à 40 cm, juste assez pour pouvoir taper son voisin tout en essayant d’esquiver les coups.

Comportement –

Il se déplace surtout en sautillant, et escalade ainsi les rochers qui lui permettent de rejoindre sa colonie. Contrairement au gorfou sauteur, qui ne va pas très loin ce flemmard, le gorfou macaroni va se nourrir à environ 100 km, mais certains vont jusqu’au front polaire, à environ 300-400 km au sud de Crozet ! Pour aller si loin, il marsouine et atteint une vitesse moyenne de 7,5 km/h. Il plonge à des profondeurs de 20 à 80 mètres en journée, mais pas en dessous de 20 mètres la nuit, probablement parce que ça fait peur (en vrai, c’est pour s’adapter au comportement de ses proies). Il peut rester sous l’eau entre 2 et 3 minutes.

Alimentation –

Actif majoritairement la journée, il se nourrit principalement de krill et calmars, et peut consommer également poissons et crustacés.

 

Gauche : Gorfou Sauteur ; Droite : Gorfou Macaroni (aquarelle Alexandre Vong - encore lui...)

 

 Redactrice  : Elodie Paciello, vétérinaire, manchologue en résidence à la Baie du Marin, programme 137/Ipev

 

FICHE ESPECE 2 : LE MANCHOT PAPOU

 

Le Manchot papou (Pygoscelis papua)

Critères d’identification -

Le Manchot papou est de loin le plus beau des sphéniscidés de Crozet vêtu de son smoking noir sur la face dorsale et blanc sur la face ventrale. Son bec fin, terminé par une pointe de noir, est intégralement orange. Cette couleur est également rappelée sur ces pattes. La finition parfaite à cette véritable habit de soirée, les deux taches blanches à la forme triangulaire au niveau des tempes rappelant une nuit étoilée.

Il mesure entre 76 et 81 cm et pèse entre 4,5 et 8,5 kg.

 

Cycle de vie –

Le Manchot papou vit en péninsule Antarctique et sur les îles proches ainsi que dans les îles subantarctiques comme les archipels Crozet et Kerguelen. Le papou est le premier des Sphéniscidés de Crozet à revenir sur terre pour s’y reproduire. Il se reproduit près des côtes, parfois jusqu’à plusieurs kilomètres à l’intérieur des terres. La femelle dépose deux œufs dans un nid, à découvert sur le sol, fait de pierres, d'herbes Tussock et de mousses. Une ponte de remplacement est possible s’il y a un échec de reproduction !

Les deux parents se partagent l’incubation et la protection des poussins tous les 2 ou 3 jours. Les parents continuent à nourrir leurs poussins jusqu'à ce qu'ils aient 80 jours. C’est aux alentours de cette période que les jeunes obtiennent leur plumage. Les adultes quittent la colonie au départ des poussins mais reviennent à terre quelques semaines après (en mars) pour muer pendant 20 à 25 jours.

 

Colonie –

Les colonies sont de tailles restreintes allant de quelques dizaines de couples (ici à Crozet) à quelques centaines de couples et peuvent se déplacer d’une année sur l’autre. Les colonies se situent sur des plages, des vallées, des collines ou encore des sommets de falaises. Ces manchots peuvent également faire leur nid au milieu des herbes Tussock.

 

Comportement –

Le Manchot papou est un athlète hors pair capable de plonger plus profond que les autres, réduisant ainsi la compétition pour la nourriture. Il peut descendre jusqu’à 50 mètres de profondeur, voire 130 mètres, pour se nourrir ! Et ce n’est pas fini, en plus de cette performance déjà impressionnante, il est le manchot le plus rapide sous l’eau, pouvant atteindre une vitesse de 35km/h !

C’est un manchot grégaire et, même en mer, il forme parfois de grands groupes pour mieux capturer ses proies. Les jeunes apprennent à nager ensemble, entrant dans l’eau peu profonde afin de barboter près de la rive.

Les oiseaux subantarctiques sont sédentaires tandis que les oiseaux antarctiques réalisent de courtes migrations. Pendant la période de reproduction, le mâle effectue quelques parades afin d’établir le site du nid et d’attirer une femelle. Les cailloux utilisés pour le nid sont attractifs pour la femelle et durant les parades le mâle lui offre des petites pierres afin d’obtenir ses faveurs. Trop mignon !!!!

 

Alimentation –

Il se nourrit principalement de krill (ce qui offre une couleur rosée à ses fientes, toujours trop classe), mais aussi de poissons et de calmars.

 

Menaces -

Les changements environnementaux et les activités de pêche représentent des menaces reconnues, à cause de la réduction des ressources alimentaires et du risque de capture par des engins de pêche. De plus, la présence d’une épidémie (suspicion d’herpesvirose) pourrait être à l’origine de mortalité anormales constatées chez cette espèce.

 

Otaries, orques et phoques léopards sont les principaux prédateurs des adultes. Les Skuas et les Goélands s'attaquent aux œufs et aux poussins.

Gauche : Manchot Royal ; Droite : Manchot Papou (aquarelle Alexandre Vong, ornithologue programme 109/ Ipev)

 

 Rédactrice : Nolwenn Trividic, agent de la Direction de l'Environnement/Réserve Naturelle de Crozet (Mission59), ornithologue et spécialiste passionnée de la promotion de Mère Nature, lobbyiste beurre salé / TAAF